Nous contacter|Nous suivre sur
«Nous avons changé tout le fonctionnement de l’hôpital»
Le chef de pôle territorial des urgences et coordonateur médical Covid du Grand hôpital de l’est francilien revient pour nous sur les heures paroxystiques de l’épidémie.
Omar Belkhodja - En situation de catastrophe, la gestion de la crise ne s'improvise pas. Nous avons au sein du Grand Hôpital de L’Est Francilien (GHEF) une unité de situations sanitaires exceptionnelles sous la responsabilité du docteur Le Port. Nous avons depuis plusieurs années effectué des exercices, souvent en lien avec un afflux massif de victimes. Ce qui nous a permis de simuler des scénarii notamment en termes de circuits. Ces exercices nous ont permis de ne pas découvrir avec le Covid ce qu'est la gestion d'une crise et nous ont surtout permis d'avoir nos réseaux déjà articulés avec nos partenaires directs : l'ARS, le Samu, le SDIS et la Préfecture.
Omar Belkhodja - D’abord il fallait une coordination et une stratégie pour maintenir un système hospitalier organisé malgré la crise. Le directeur Jean-Christophe Phelep nous a confié à Jean-Paul Houlier (directeur adjoint) et à moi-même la coordination de la crise sur les versants administratif, opérationnel et médical. À partir de cet instant, nous avons constitué une cellule stratégique Covid qui s’est réunie depuis 3 mois tous les jours y compris les week-ends pour un suivi de la crise, pour maintenir l’information à tous les niveaux notamment sur les doctrines nationales et régionales et pour avoir une stratégie commune déployée sur tous les sites du GHEF.
Les équipes se sont adaptées d’une manière naturelle et spontanée. Un élan extraordinaire de solidarité interservices est né dès l’annonce du plan blanc. Nous avons vu des gériatres, des chirurgiens, des légistes, des dermatologues aux urgences. Des chirurgiens en Ehpad faire des dépistages. Des infirmières et aides-soignants changer de service et de rythme de travail. Des administratifs, des informaticiens, le bionettoyage, la logistique, les services médico-techniques, le brancardage s'adapter à un mode organisationnel inhabituel. Cette période restera un souvenir incroyable dans notre histoire de soignants et de personnel hospitalier.
Omar Belkhodja - Nous avons changé bien plus que nos façonsde travailler... Nous avons changé tout le fonctionnement de l’hôpital. Toutes les activités programmées ont été suspendues tout d’abord par sécurité pour les patients dans le contexte du Covid et ensuite pour déployer les locaux et le personnel sur des secteurs qui en avaient besoin. L’hôpital a orienté son activité vers le Covid. Ainsi les horaires des personnels ont été modifiés, les congés gelés pour faire face à l'urgence sanitaire.
Omar Belkhodja - Tous les partenaires nous ont été précieux. Les soignants retraités de retour à l’hôpital, le SDIS, la Croix rouge, la communauté médicale et des infirmières libérales de notre territoire (la CPTS, l’URPS), les cliniques, les Ehpad, les élus locaux, les donateurs avec toute leur générosité, la population en ayant respecté les mesures barrières. J’en oublie certainement. L’implication de tous a permis de donner une force aux soignants et autres personnels du système de santé qui ont tout de même vécu une période éprouvante.
Omar Belkhodja - Oui le 27 mars, nous avions un flux important aux urgences avec des patients plus graves que les jours précédents et un nombre de lits d’hospitalisation qui se réduisait de plus en plus. Nous avons été en tension mais pas submergés. Nous avons à chaque fois anticipé des ouvertures de lits de manière à garder un temps d’avance sur la crise.
Omar Belkhodja - Au plus fort de la crise, le GHEF avait 73 lits de réanimation dédiés au Covid et 264 lits de médecine également destinés aux patients Covid, répartis comme suit :
• Marne-la-Vallée : 47 lits de réanimation et 138 lits de médecine ;
• Meaux : 18 lits de réanimation et 82 lits de médecine ;
• Coulommiers : 8 lits de réanimation et 44 lits de médecine.
Nous avons progressivement réduit la capacité d’accueil sur les trois sites principaux du GHEF. Au 19 mai 2020, nous avions sur les trois sites hospitaliers du GHEF, 14 lits de réanimation dédiés Covid et 86 lits de médecine.
Omar Belkhodja - Au niveau territorial, nous disposons d’une filière gériatrique sous la responsabilité du docteur Jolly. Cette filière a été activée sous la coordination de l’ARS 77 pour apporter une aide médicale, logistique et or-ganisationnelle aux Ehpad du nord Seine et Marne. Ainsi, des gériatres du GHEF ont été déployés au niveau de certains Ehpad pour apprécier l’état clinique des patients.
Par la suite, les équipes du GHEF ont réalisé des dépistages de PCR pour les résidents et pour les personnels des Ehpad.
Je me rappelle également du week-end de Pâques où nous nous sommes répartis entre urgentistes et gériatres certains établissements en difficultés pour assurer une permanence téléphonique d’accompagnement médical. Au-delà des organisations médico soignantes propres aux Ehpad et de celles apportées par la filière gériatrique du GHEF, les médecins de ville, les infirmiers libéraux et SOS Médecins sont également venus en aide et en renfort aux Ehpad.
Omar Belkhodja - Le flux des patients issus du Covid a nettement diminué. Néanmoins à la demande de l’ARS, nous maintenons une organisation d’accueil aux urgences et d’hospitalisation de manière à faire face à une 2e vague si tel était le cas.
Omar Belkhodja - Le GHEF reprend progressivement son activité de consultations et d’interventions chirurgicales. Nous sommes actuellement à 50% de notre rythme habituel. Des mesures barrières ont été mises en place avec des points de filtrage à l’entrée de chaque site hospitalier. Les salles d’attente ont été réorganisées, les créneaux entre chaque patient ont été revus. Nous développons également la téléconsultation. Le GHEF se réorganise de manière à assurer la reprise des soins en toute sécurité pour les patients et pour le personnel soignant. Il me semble important que les patients de notre territoire se sentent rassurés par rapport aux conditions d'accueil que l'hôpital leur réserve.
Omar Belkhodja - Nous avons reçu des messages et des visites de solidarité et de soutien de la part des maires et des élus de notre territoire qui prouvent à quel point la santé de leurs administrés et celle de l’hôpital ont été au centre de leurs préoccupations.
Nous remercions la population d’avoir respecté les mesures barrières et d’avoir évité «l’explosion» de notre système de santé. Un vrai message à ceux qui ont des pathologies chroniques et des problèmes de santé est de ne pas attendre que leur état ne s’aggrave pour consulter. En conclusion, il est important de rappeler que la crise n'est pas finie et que nous nous devons de continuer à respecter les gestes barrières et à faire attention aux regroupements pour diminuer au maximum la circulation du virus.
Nous contacter
Publications
https://www.marneetgondoire.fr/index.php?id=1781
StratisRéalisation